La formation doit lutter en permanence contre son « silotage » parce que la proximité avec les clients n’est jamais définitivement acquise et que les barrières menacent sans cesse de réapparaître, empêchant la créativité de pleinement s’exprimer… Le bon usage du digital lui permet de s’ouvrir au grand large !
La formation dans son silo
La formation s’est longtemps jouée en « silo » : trop auto-centrée (au risque du nombrilisme), arcboutée sur des activités au lien parfois ténu avec le service qu’elle est censée rendre à ses clients ; les collaborateurs et la direction de l’entreprise considérant à juste titre que sa raison d’être tient dans sa contribution à la performance opérationnelle des métiers, comme au développement du capital humain et à la stratégie de l’entreprise. Parler du silo de la formation, c’est dire que toutes les barrières n'ont pas été abattues, comme le montrent :
- Le temps consacré par le service formation à sa gestion administrative et à sa mise en conformité avec une législation débridée (essayez donc d’expliquer, hors l’Hexagone, notre système de formation professionnelle continue : les yeux s’arrondiront) ;
- La lourdeur d’un processus budgétaire et d’un plan de formation prévoyant des formations qui seront délivrées au moment où ces besoins auront cessé d’exister ;
- Le décrochage fréquent du design pédagogique (soit conçu comme une activité de laboratoire, soit, au contraire, répétant l’existant au prétexte qu’on a toujours fait ainsi) d’avec les véritables besoins et contraintes des clients internes ou externes, faute d’avoir consacré suffisamment d’efforts à la connaissance du terrain et à l’analyse des demandes.
Les difficultés auxquelles doit s’affronter une fonction formation qui forme le projet de se « désiloter » sont considérables. Il lui faut lutter contre des mauvaises fées qui se sont penchées, dès 1971, sur son berceau (il est vrai que l'action de celles-ci a pu être en partie compensée par celle des bonnes fées), ce qui explique pourquoi la formation en est là aujourd’hui, et pourquoi il lui faut apprendre à penser contre elle-même (ce n’est pas un exercice naturel).
Le digital mène l’assaut
Vingt ans après, ce paysage n’est plus tout à fait d’actualité, même s’il se maintient dans certaines postures ancrées dans le passé. En pleine « digitalisation », le secteur de la formation se désilote rapidement ; sous l'action du digital, en effet, les barrières se dissolvent peu à peu :
- Le lien entre la formation et les clients se resserre : via le Web, tout-un-chacun accède directement au catalogue illimité de formations insoupçonnées auparavant (interrogeant au passage l’intérêt des offres du service formation interne lui-même) ;
- Les barrières d’accès au marché de la formation se sont abaissées : des nouveaux fournisseurs issus de l’économie numérique y ont fait irruption au grand dam des organismes de formation traditionnels et de leurs alliés de longue date dans les services formation ;
- Dans l’entreprise, expertises de contenu et pédagogique se fondent progressivement : les experts de terrain peuvent s’approprier des outils auteurs simples d’utilisation et dotés d’une véritable intelligence pédagogique, pour produire des capsules de savoir « juste à temps » et de les diffuser tout aussi rapidement ;
- Les outils digitaux permettent d’assurer un « continuum de formation » qui aide les formateurs à mieux connaître et suivre leurs apprenants avant, pendant et après la formation, jusqu’à pouvoir s’impliquer dans la mise en œuvre des savoirs en situation de travail, en liaison avec les managers (une autre barrière qui saute) ;
- Dans le cadre même de l’équipe formation, un travail collaboratif se noue, qui était autrefois réduit à la portion congrue - collaboration devenue impérative, compte tenu de la diversité et de la profondeur des expertises qui sont mises à contribution dans l’analyse des besoins, le design et la production des solutions pédagogiques.
Le grand large
Au sortir de son silo, la formation s’ouvre au grand large. Affrontant les joies et périls d’une navigation par mer calme, houleuse ou tempétueuse, elle affronte x rencontre (« to meet the needs ») les espoirs que l’entreprise, ses métiers et ses collaborateurs fondent sur sa contribution. Pour garder le cap, il lui faut se doter d’une bonne boussole ; un radar sera utile pour identifier les écueils… quant aux compétences à mobiliser, elle pourra s’inspirer de celles des navigateurs de haute mer : solidité stratégique, capacité à prendre le vent (ou à le sentir tourner), agilité et réactivité dans la prise de décision, suivi dans la réalisation et faculté à remettre en cause ses décisions qui s’avèreraient erronées, expertises techniques (pédagogiques, numériques)…
Qui est contre ?!
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